Maman fait grève *

ça, c'est ce que j'ai mis sur ma porte d'entrée pour les faire patienter pendant que je fais grève.

* titre emprunté à Bibiche qui m'a inspiré ce billet.

J'aurai pu aussi l'appeler "Maman est débordée" ou "Maman en a ras la casquette que tout le monde lui pourrisse son emploi du temps avec des réunions aussi longues qu'inutiles, des spectacles en tout genre (en vrac : Vizendao, Cirque, Carnaval, kermesse), des ultimatums permanents -j'ai besoin d'un tee-shirt vert à pois bleus pour demain matin, Maman- et un mari "quibossecommeunmabouletqu'estquasijamaislà" "ouaisjesaisc'estdurmaisbonyapaslechoix". On conjugue ça avec "tient, cette semaine, si tu appelais tous les boss de la région pour prendre rendez-vous cette semaine parce que tu n'as qu'une semaine pour décider de ton sort pour l'année prochaine". Elle est pas belle la vie ?


Bref, Maman "a les nerfs" et surtout un agenda qui se remplit à vue d'oeil et pas seulement de choses sympathiques. Du coup, Maman est absente souvent et doit souvent s'organiser pour gérer tout le monde, caser les uns et les autres au pied levé et finalement régler beaucoup de choses avec une Paupiette sous le bras et les autres qui se gèrent seuls à la maison (amis de la DASS, vous me voyez venir).

Nécessité faisant loi ( et cette maxime me poursuivant partout), j'ai donc laissé plusieurs fois les trois grands s'organiser seuls à la maison. Et j'ai pu constater les bienfaits de mon absence. Car en mon absence, ces messieurs-dames sont bien plus organisés qu'il n'y parait. Je suis rentrée, tout le monde avait pris son bain, avait dîné, s'était lavé, avait rangé sa chambre et regardait tranquillement un DVD. Idem pour L'Albatros qui devait s'occuper de sa soeur et la ramener à la maison pendant que j'allais chercher le P'tit Prince avec la Paupiette. Idem encore quand l'Albatros est allée chercher sa soeur à l'école pour la ramener à la maison et la faire déjeuner. Idem enfin quand tous ont impeccablement rangé la maison pour faire un beau cadeau d'anniversaire à leur père. Tous très fiers d'avoir mené à bien leur "mission si tu l'acceptes tu peux être fier de toi".

Et ben merde alors.

Quand je ne suis pas là ça se passe mille fois mieux. De quoi te donner envie d'aller prendre tranquillement un pot tous les soirs avec tes potes pendant qu'ils s'organisent paisiblement à la maison.

Bilan de l'opération : les missions de confiance, visiblement, ça les valorise à fond. Je crois que les choses n'ont jamais été si bien faites que cette semaine (pourtant épuisante pour moi). Et ça m'ouvre des pistes pour l'année prochaine avec la reprise du boulot. Mes enfants sont tout à fait capables de se prendre en main pour les rituels du quotidien et je compte bien en profiter pour que parfois ils déjeunent seuls, rentrent seuls, travaillent seuls.
Certes il y a une question d'âge. A 10 ans , 7 ans 1/2 et 5 ans1/2, ce ne sont plus des bébés. Mais j'ai toujours tendance à sous-estimer ce dont ils sont capables sans mon aide. Le fait d'être en ce moment à la maison n'aide pas non plus à la prise de conscience de leurs capacités réelles en autonomie.

On en revient au concept de "saine négligence" de Faber et Mazlish que décidément j'aime beaucoup. En n'étant pas toujours sur leur dos, on leur offre la possibilité de se prendre en main, d'avoir leurs propres initiatives et de mesurer les conséquences de leurs actes puisqu'il n'y a personne pour rattraper le coup.

Je finirai avec un exemple de mon entourage. Une famille assez bohème. Le grand n'importe quoi quasi permanent (un peu moins depuis qu'ils sont ados) Les enfants savent depuis tout petits que bien qu'ayant des parents, leurs parents les aiment mais ils doivent s'auto-gérer. Personne ne respectera leur rythme de sommeil, leur sécurité, leur bien-être personnel. D'un point de vue lointain, on pourrait dire que ces enfants sont malmenés. Or, force est de constater qu'ils savent parfaitement se gérer. Ils se connaissent mieux que personne, sont capables d'évaluer le danger au millimètre près, d'aller se coucher seuls à une heure tout à fait classique sans que personne ne le leur demande, capables de se débrouiller pour n'importe quoi. Ceci sans compter une confiance en eux admirable. Sans vouloir imiter cette famille qui a involontairement (et inconsciemment) créé cette auto-gestion, je dois reconnaître que des compétences réelles ont été façonnées chez les enfants. Compétences que mes enfants n'ont pas ou alors bien peu en comparaison de ce qu'ils ont développé.

De la modération en toute chose disait Hildegarde de Bingen. Point n'est besoin d'aller jusqu'au grand n'importe quoi pour éduquer nos enfants. En revanche, une dose de saine négligence leur est tout à fait bénéfique.

Donc Maman fait la grève. Pour leur plus grand bien.

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